L’eau de Pâques

Les cérémonies religieuses entourant la fête de Pâques sont imprégnées de symboles de renaissance, particulièrement à la veillée pascale. Au cours de ce rituel, le prêtre bénit le feu nouveau et l’eau qui sera utilisée toute l’année pour les baptêmes et les bénédictions spéciales et déposée dans les bénitiers.

L’équivalent familial de cette célébration est la cueillette de l’eau de Pâques. Cette tradition, vieille de plusieurs siècles, nous a été transmise par nos ancêtres français.

À l’aube de cette journée, le père et ses enfants les plus âgés se mettent en branle. Le groupe, éclairé par le fanal, se dirige en silence vers une source qui coule bien. Arrivé sur place, le père vérifie si la glace consent à libérer l’eau tant convoitée. Si non, il l’aide de quelques coups vigoureux de hachette car le temps presse, tout doit être terminé avant le lever du soleil. L’eau, cueillie à contre-courant, remplit à ras bord chacune des cruches, ce sera la réserve d’eau spéciale de l’année entière. Lorsque le soleil montre ses premiers rayons, fiers de leur réussite, ils sont prêts à célébrer Pâques… Et même à croire que le soleil danse à ce moment comme l’affirmaient certains anciens!

Mais pourquoi se donner tant de mal pour de l’eau? Parce que cette eau, un peu miraculeuse, se conserve toute l’année sans se corrompre. Elle est un gage de protection contre les intempéries et contre certaines maladies.

Il est d’ailleurs recommandé d’asperger maison et bâtiments de ferme à l’aide d’un rameau béni et trempé dans l’eau de Pâques pour les protéger de la foudre, du tonnerre et des vents violents… mais aussi des mauvais esprits et des malheurs! Lors d’orage, de travaux ou d’expéditions dangereuses, les personnes se placent sous protection divine en se signant avec cette eau.

Ma mère en utilisait pour fabriquer son propre sirop contre le rhume ou le croup. Elle faisait bouillir dans un peu d’eau de Pâques, des fleurs d‘herbe à dinde (achillée mille-feuille), du miel et du jus de citron jusqu’à ce qu’elle obtienne un sirop clair mais consistant. Il était très efficace.

Il n’y a pas si longtemps, les Chevaliers de Colomb organisaient un autobus pour aller chercher l’eau de Pâques à la source de Saint-Faustin. Pendant le trajet et sur place, régnait un silence respectueux et tous avaient le temps de puiser leur eau avant le lever du soleil. L’ambiance joyeuse du retour, ponctuée de chants et de prières, était au diapason de la grande fête de la résurrection!